“Pourquoi sont-ils là ?” interroge l’affiche du film Premier Contact, qui envisage l’invasion extraterrestre de la Terre. Les Hongkongais se sont eux aussi immédiatement posé la question en découvrant cette publicité, puisque le vaisseau alien se trouve en suspension au-dessus de Victoria Harbour, le détroit de Hong Kong, sur lequel est venue se greffer la célèbre tour Shanghai. Une énorme erreur géographique qui a provoqué une vague de protestations dans la Région administrative spéciale (RAS), dont les relations avec Pékin sont très tendues.
A peine l’affiche mise en ligne sur les réseaux sociaux, le 16 août, que “des milliers de commentaires négatifs et d’émojis de colère étaient écrits par les internautes, soulignant l’erreur géographique évidente”, rapporte le South China Morning Post. Toutes ces plaintes étaient accompagnées du hashtag #hongkongisnotchina, soit “Hong Kong n’est pas la Chine”.
Un contexte tendu
Face à ce déferlement de protestations, le distributeur Paramount Pictures n’a pas tardé à retirer l’affiche fautive. Mais l’erreur a laissé des traces à Hong Kong, comme l’explique le quotidien anglophone local :
L’hostilité à la Chine continentale s’est développée à Hong Kong ces dernières années, avec des plaintes contre, par exemple, le trafic de fausses marchandises depuis la Chine ou la colère contre l’impact négatif sur la ville des touristes venus du continent.”
Réalisé par le Canadien Denis Villeneuve, Premier Contact raconte l’arrivée mystérieuse de plusieurs vaisseaux spatiaux au-dessus de mégalopoles terriennes. La campagne de promotion est donc mondiale, mais “aucune des 12 autres affiches du film ne contenait d’erreur géographique”, pointe le South China Morning Post.


Le grand quotidien de langue anglaise de Hong Kong est depuis 2016 la propriété d’Alibaba, géant chinois du commerce électronique. Cette acquisition a suscité de fortes craintes que la liberté de ton et la qualité journalistique de ce journal s’érode, voire disparaisse. Quoi qu’il en soit, le SCMP, resté en situation de monopole sur le marché des quotidiens de langue anglaise dans l’ex-colonie britannique, demeure indispensable à qui veut suivre la Chine. Le quotidien assure un suivi factuel de l’actualité chinoise et hongkongaise très complet. Les pages magazine fournissent parfois de bons reportages sur les pays voisins.
Auparavant, un glissement éditorial notable avait déjà pu être observé sous la houlette de Robert Kuok, homme d’affaires sino-malaisien proche de Pékin devenu actionnaire principal en 1993.
Jadis journal de référence des « China watchers », le journal s’était graduellement débarrassé, après l’arrivée de Robert Kuok, d’un certain nombre de journalistes, il avait édulcoré ses pages d’opinion et s’était mis à se fonder de plus en plus sur des dépêches d’agence pour traiter des informations ne montrant pas Pékin sous son meilleur jour.
Après l’éviction de Willy Wo-lap Lam, responsable des pages Chine, en 2000, dont les analyses de la politique pékinoise étaient jugées trop indépendantes, ce fut en 2002 le tour du chef de son bureau pékinois, Jasper Becker, d’être licencié. Les pages éditoriales, où les figures de la politique hongkongaise avaient pour habitude d’échanger les opinions les plus diverses, devenaient décevantes.