Carrefour part à la chasse aux start-up
Avec les défis de l’e-commerce, la recherche accrue d’innovations pour satisfaire les clients et améliorer le fonctionnement du groupe, Carrefour fait de plus en plus appel à des start-up pour trouver des idées. Une petite révolution dans la manière de travailler.
Morgan Leclerc
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Morgan Leclerc
Pour sa première édition, qui se tenait à Paris fin juin 2016, le salon Viva Technology a déroulé le tapis rouge à plusieurs milliers de start-up, bien décidées à séduire de nouveaux partenaires en mettant en avant leurs savoir-faire. Et Carrefour n’a pas voulu rater l’événement. Sur son espace, le distributeur regroupait 47 jeunes pousses aux profils différents, avec lesquelles il est en cheville… ou pas. Car pour trouver des bonnes idées, notamment dans le digital, le principe est de multiplier les tests et expérimentations. "e nombreux partenaires potentiels n’ont pas encore été identifiés à ce jour", a d’ailleurs souligné le PDG, Georges Plassat, à l’occasion d’un débat organisé autour de l’innovation.
"Il faut amener les nouvelles technologies dans les magasins existants. […] Mais le problème principal, c’est qu’il faut savoir filtrer toutes les données que nous recevons."
Georges Plassat, PDG du groupe Carrefour
Des développeurs en interne et en externe
Carrefour cherche aujourd’hui de nouvelles manières de travailler autour de cette sacro-sainte notion d’innovation, notamment en explorant plus avant le monde des start-up. Début 2015, il a ainsi investi dans Partech Growth, fonds d’investissement destiné aux entreprises technologiques et digitales à forte croissance. Et depuis un an, une division innovation a été créée au sein du groupe. Elle compte une trentaine de personnes, et s’appuie à la fois sur l’interne (des ambassadeurs sont présents dans toutes les divisions de l’entreprise) et sur l’externe. "C’est une activité nouvelle, qui a de bons résultats. Et pour accélérer le mouvement sur l’innovation, nous nous appuyons sur les start-up. L’avantage de travailler avec ce type de structures, c’est que nous avons la capacité de faire du 'test & learn' très rapidement", explique Hervé Parizot, directeur e-commerce et data de Carrefour.
"Pour accélérer le mouvement sur l’innovation, nous nous appuyons sur les start-up. L’avantage de travailler avec ce type de structures, c’est que nous avons la capacité de faire du “test & learn” très rapidement."
Hervé Parizot, directeur e-commerce et data de Carrefour
Coller à la stratégie omnicanal du groupe
En Espagne, une cellule similaire existe, avec des procédures de paiement accélérées pour les start-up et un référencement plus rapide. Attention, cependant, à ne pas voir la poule aux œufs d’or derrière chaque jeune pousse. Pour avoir une opportunité de collaborer avec Carrefour, mieux vaut s’inscrire dans la stratégie omnicanal du groupe. Les thématiques des entrepreneurs présents sur l’espace Carrefour sont vastes, touchant à la fois les ressources humaines, le click & collect, l’optimisation des sites ou la lutte contre le gaspillage alimentaire, avec toutefois une forte appétence pour l’e-commerce.
Au fil du temps, Carrefour a déjà investi dans certaines entreprises comme Mydesign (qui propose des corners d’objets personnalisables en magasins), croquetteland.com (animalerie en ligne) et grandsvins-prives.com (vente en ligne de bouteilles d’exception). L’un d’entre eux confie que, depuis le rachat, le mode de management n’a pas beaucoup changé, avec une grande autonomie laissée à la structure. Justement pour garder la souplesse et la réactivité qui caractérisent les petites organisations, ce qui n’empêche pas quelques synergies. Le site grandsvins-prives.com est ainsi adossé à Johanès Boubée, la filiale de Carrefour en charge des achats en matière de vins.
L’un des objectifs du distributeur est de casser les silos entre ces différentes unités pour être pleinement multicanal, mais les magasins vont rester sur le devant de la scène, avec, si possible, des avancées en matière de moyens de paiement, de click & collect, d’amélioration des commandes, des livraisons et de la satisfaction clients. Autant de sujets sur lesquels les start-up apporteront des avancées, en espérant attirer l’attention (et des contrats) auprès de la grande distribution.
Des concepts en devenir
PHENIX, « Meetic des invendus » est une solution de gestion antigaspillage. Elle recense les dons et récepteurs potentiels pour les invendus encore comestibles. Mais surtout, elle propose des services B2B aux magasins, comme des coach antigaspi, et développe des nouvelles filières (fruits et légumes abîmés recyclés en alimentation animale, par exemple). Un contrat cadre de 30 magasins (surtout des hypermarchés) existe déjà avec Carrefour. Phenix, qui avance une réduction de la facture des déchets par trois, ne se rémunère qu’en cas de création de valeur en magasin.
ALKEMICS s’appuie sur une technologie d’analyse de datas pour automatiser le partage des données produits des marques afin d’enrichir les fiches produits des sites en ligne. Auchan et Walmart ont déjà dit oui à la start-up imaginée par le polytechnicien Antoine Durieux.
Grâce à la jeune entreprise FITTLE, Carrefour propose à ses clients de créer, en moins de une minute, un avatar en 3D via son smartphone, grâce à la prise de quelques photos. Une façon d’essayer, de façon virtuelle, les vêtements en ligne de sa marque de textiles Tex.
OPTIMIAM, testée sur 8 Carrefour City de Paris, offre 50 % sur certains produits frais arrivant en fin de vie, en précisant le stock disponible restant. Une application pour mobiles idéale pour limiter la casse.
Des « jeunes pousses » déjà bien implantées
MYDESIGN.COM permet de créer toute une gamme de produits personnalisables (coussins, mugs, tee-shirts, etc.) sur le Net, mais également au travers de plus d’une vingtaine de boutiques-fablab installées au sein même des hypermarchés Carrefour. Un chiffre destiné à croître, la personnalisation étant une tendance forte en ce moment. Cette PME, qui commence à être connue, a été créée par le cofondateur de Cdiscount, Christophe Charle.
CRITZR recueille les avis en magasin et fait l’interface avec les directeurs de magasins. La start-up lilloise, utilisée notamment chez Bricorama, Eram ou encore Nocibé, s’est vite rendue indispensable auprès de Carrefour ; l’ensemble des directeurs d’hypers et de supermarchés sont désormais équipés de cette solution qui remonte plus de 5 000 verbatims passés au crible chaque mois afin de détecter les motifs d’insatisfaction et y remédier.
INPOST, le spécialiste des casiers de retrait abricolis pour les commandes en ligne, travaille déjà avec plusieurs concurrents. Il mène actuellement un test pilote sur quelques magasins du réseau Carrefour Proxi.
La Fnac, Cdiscount et The Kooples oeuvrent déjà avec DELIVER.EE, qui offre plus de 1 000 coursiers pour livrer à domicile. Le tout avec un suivi en temps réel possible et personnalisé par mail, SMS ou via un chat.
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