En 2049, je me transporte en un clic !

Le Lilium Jet, biplace électrique à décollage vertical, a fait son baptême de l’air en 2017 en Allemagne.

Le Lilium Jet, biplace électrique à décollage vertical, a fait son baptême de l’air en 2017 en Allemagne. LILIUM / COVER IMAGES / SIPA

Décryptage  La mobilité dans trente ans ? Simple, propre, efficace ! Plus besoin de posséder une voiture ou un vélo, nous serons tous abonnés à un service qui s’occupera de tous nos trajets, et bien entendu, tout cela sans émettre de CO2.

Cette fois, on y est : la voiture a disparu de nos préoccupations quotidiennes. Plus besoin de se poser des questions sur le modèle dont nous avons besoin, sur la pollution qu’il engendre et, surtout, sur son poids faramineux dans notre budget (à elle seule, l’auto représente 10 % en moyenne de nos dépenses, selon l’Insee). Non, car nous n’en avons plus besoin.

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En 2049, quand on veut se déplacer, on cherche sur une application de son smartphone comment se rendre au travail, ou bien de Limoges à Bordeaux. On est abonné à un des nombreux services de mobilité qui se sont développés et qui ont remplacé les grandes marques automobiles. L’appli intègre tous les transports, elle connaît nos préférences – plutôt électrique, plutôt hydrogène, plutôt train, plutôt vélo –, et elle fixe la suite des événements grâce à l’intelligence artificielle.

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Prendre un taxi-drone ou foncer en Hyperloop

En fonction de l’option mensuelle que nous avons choisie – un abonnement coûte entre 50 et 1 000 euros selon son standing – elle nous dirige vers une combinaison de transports en commun ou bien vers des services individualisés comme une voiture partagée que nous rejoignons en vélo électrique. Ou encore – c’est la formule grand luxe à 3 000 euros par mois –, un taxi-drone qui vient se poser devant chez nous, pour nous amener au bureau, ou à la gare du TGV ou de l’Hyperloop, ce train souterrain ultrarapide qui commence à relier les grandes villes du continent, voire à l’aéroport.

Maquette de l'Hyperloop, le train supersonique pensé par Elon Musk, le fondateur de Tesla. (ALPACA / ANDIA.FR)

Maquette de l'Hyperloop, le train supersonique pensé par Elon Musk, le fondateur de Tesla. (ALPACA / ANDIA.FR) © ALPACA / ANDIA.FR

Côté aérien, il reste un problème : les avions ont fait des progrès – ils décollent et se posent à l’aide d’un moteur électrique, ce qui les rend silencieux et a permis d’ouvrir les aéroports la nuit sans déranger les riverains – mais les ingénieurs n’ont pas encore trouvé le moyen de remplacer le bon vieux réacteur à kérosène durant le vol lui-même. Certains commencent d’ailleurs à prédire une fin totale des aéronefs s’ils ne font pas un progrès technique décisif, sur lequel Airbus ou Boeing planchent sans succès depuis des décennies : après tout, rien n’empêche de relier les continents par des Hyperloops, si ce n’est les investissements gigantesques pour construire les tunnels, ou par des bateaux à navigation solaire, pour ceux qui ont du temps.

Des voitures connectées, mais toujours des bouchons !

En 2049, grâce à de gros efforts internationaux, le transport n’est donc – presque – plus générateur de CO2, alors qu’il pesait 24,4 % des émissions mondiales de carbone en 2019, dont 75 % par les autos ou camions. Au fil des ans, la géographie urbaine s’est transformée : des pistes protégées ont été construites dans toutes les villes et même le long des grandes routes, ce qui a permis le développement de multiples instruments de locomotion personnels peu ou pas polluants, dérivés des vélos du passé ou des skateboards. Ils sont davantage utilisés que les voitures pour les déplacements individuels car depuis qu’on ne risque plus de se faire écraser par les chauffards ou les têtes en l’air, on n’a plus peur de pédaler.

Certes, toutes les promesses du passé, celles qu’on faisait encore en 2019 par exemple, ne sont pas tenues : même avec le recul du trafic individuel et l’avènement des voitures connectées qui décident toutes seules du meilleur trajet à suivre, les bouchons existent toujours, car les horaires de travail n’ont pas changé et tout le monde se retrouve sur les routes en même temps.

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De plus, l’autonomie des véhicules n’est jamais devenue totale et le volant n’a pas disparu du tableau de bord, comme le prévoyait d’ailleurs dès 2018 Carlos Tavares, le PDG du groupe PSA. La loi impose toujours au conducteur de rester attentif et il doit reprendre de temps en temps le contrôle de son véhicule, quand il entend un petit bip aigu. Autrement dit, il faut encore passer un permis de conduire, mais on n’est plus très loin de la phase ultime de l’autonomie. Une fois que les derniers véhicules traditionnels avec conducteur auront disparu et que les auto-robots pourront tous communiquer entre eux, sans avoir à intégrer dans leurs calculs les réflexes imprévisibles de ces humains ingérables.

L’asthme et les allergies reculent enfin

Grâce à ces évolutions, les indicateurs écologiques se sont nettement améliorés : la qualité de l’air a retrouvé son niveau d’avant la révolution industrielle, et du coup, l’asthme et les allergies reculent enfin. Les transports en commun roulent indéniablement mieux, car ils ont été modernisés : trains, tramways, bus et métros sont devenus automatiques. Ils roulent « propre », à l’électrique, à l’hydrogène ou en « bimode », qui combine les deux, une spécificité française.

Côté transports individuels, pour les irréductibles qui veulent encore être propriétaires de leur véhicule, la voiture à moteur thermique existe encore… mais ses ventes s’effondrent, car de nouvelles taxes ne cessent de plomber ses coûts : la vignette, supprimée en 2000 par Lionel Jospin, a été rétablie en 2030. De plus, les villes imposent des droits d’entrée à tous les véhicules polluants ! L’essence coûte désormais plus de 5 euros le litre, et les stations-service ont quasiment disparu : la plupart ont fait faillite. Faire le plein d’essence est devenu aussi compliqué en 2049 que trouver de l’hydrogène ou une borne électrique en 2019.

Cette vision de l’avenir n’est pas de la science-fiction : toutes ces solutions existent déjà, mais il faudra bien compter de vingt à trente ans avant que ces nouvelles habitudes ne se popularisent : dans le monde de la mobilité, les investissements sont lourds, les décisions mettent des dizaines d’années à prendre corps sur le terrain. Une voiture a une durée de vie moyenne de douze ans. Dans le métro, on prend toujours en 2019 des rames qui étaient modernes en 1985 et qui nous semblent encore convenables aujourd’hui. Côté avions, l’Airbus A320, best-seller du groupe sous sa version « neo » (new engine option), a commencé à voler en 1987 et la fin de sa carrière n’est même pas planifiée !

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La « mobilité comme un service »

Alors, n’attendons pas un univers radicalement nouveau dans trente ans : les racines de 2049 plongent dans la réalité de 2019. « Trois grandes mutations sont en cours, explique François Hilbrandt, spécialiste du transport au cabinet Wavestone. D’abord, celle de l’énergie : les transports seront demain décarbonés. Ensuite, la mutation technologique : l’autonomie avec les véhicules de tous types devenant automatiques. Les ingénieurs travaillent sur les projets des Hyperloops, qui circuleront dans des tunnels pressurisés ou sur l’avion à moteur électrique. Enfin, troisième grand changement, le transport devient un simple service : on n’achètera plus de voiture ou de vélo, on se contentera de les utiliser en fonction de nos besoins. »

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La « mobilité comme un service », qui transforme la voiture en un simple clic existe déjà : la start-up finlandaise Whim le propose avec un tel succès à Helsinki qu’elle fait des émules comme la britannique Citymapper, à Londres et ailleurs. Dans les deux cas, contre un abonnement mensuel, on utilise le moyen de locomotion qu’on préfère : vélo, métro, bus, taxi, voiture de location…

Dans ce futur qui existe déjà, la voiture sera forcément électrique ou à hydrogène. La route va devenir intelligente, avec des capteurs intégrés dans le sol pour nous guider, et elle rechargera la voiture pendant qu’elle roule : le groupe Bouygues teste des bitumes qui fabriquent de l’électricité solaire.

Des locomotives bimodes pour faciliter le voyage

Le train, lui aussi, prépare sa mue, aussi bien technologique, que servicielle : « Nous voulons d’abord assurer un accompagnement individualisé, avec des mobilités adaptées à chacun, pour redonner du sens au train. Nous voulons que ce qui se passe avant de prendre le train, et après, ne soit plus une source de blocage ou de découragement pour les usagers », explique Carole Desnost, directrice de l’innovation à la SNCF. Cela veut dire que la SNCF réfléchit à nous amener facilement à la gare, puis à nous faciliter le voyage, afin de lever ces obstacles qui nous conduisaient souvent à préférer la voiture.

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Sur le plan technologique, en attendant l’hyperloop ultrarapide – à partir de 2030 – les trains vont passer au zéro carbone à partir de 2022 : « Les locomotives Diesel, qui assurent encore 20 % des trajets, notamment en région, seront remplacées par des locomotives bimode, qui seront à la fois à hydrogène et à batteries électriques », poursuit Carole Desnost. Non seulement, elles ne pollueront plus, mais ce changement ne demandera même pas des investissements massifs. Avec le bimode, il ne sera plus nécessaire d’électrifier les lignes entièrement. Quelques arrêts suffiront au train pour recharger ses batteries. Ce sera une économie pour la SNCF et les régions qui financent les TER, en plus d’être une révolution écologique.

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