Les propos homophobes et transphobes d’un prof de droit à la Sorbonne suscitent un tollé

Des étudiants dans une salle de classe de l’Université Paris I Panthéon-Sorbonne à Paris. (Image d’illustration)

Des étudiants dans une salle de classe de l’Université Paris I Panthéon-Sorbonne à Paris. (Image d’illustration) STEPHANE DE SAKUTIN / AFP

En plein cours magistral, un professeur d’histoire du droit a notamment comparé l’homosexualité à de la zoophilie. Il a fait l’objet d’un rappel de la part de l’université.

« Ce que je vais dire va prendre un ton polémique. » Amar Mardirossian, enseignant titulaire en histoire du droit à Paris 1 Panthéon-Sorbonne, ne croyait pas si bien dire. Mardi 29 septembre, ce professeur de droit a tenu des propos homophobes et transphobes durant un cours magistral en direct diffusé en ligne à ses étudiants, comparant notamment l’homosexualité à de la zoophilie. Des propos qui ont suscité une vague d’indignation alors qu’ils ont fuité sur Twitter, et fait l’objet d’un « rappel » de la part de l’université.

Durant ce cours magistral, affichant ouvertement son hostilité au mariage homosexuel, Amar Mardirossian, qui est notamment l’auteur de tribunes dans « Valeurs Actuelles », affirme que « les fondements profonds de ce changement paradigmatique c’est qu’à un moment, l’homme a écarté la religion ».

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Il poursuit : « Le fondement [du mariage homosexuel] est donc la discrimination, on est bien d’accord. D’ailleurs, la discrimination est devenue un fondement pour tout et n’importe quoi, aujourd’hui on voit de la discrimination partout. »

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« J’ai une jument, je l’adore, je ne peux pas l’épouser »

Peu après, il fait un lien entre mariage pour tous et zoophilie :

« Demain, après-demain, dans dix ans, il va forcément y avoir quelqu’un qui va aller devant un tribunal et dire : j’ai une jument je l’adore, je ne peux pas l’épouser, c’est un scandale, c’est une discrimination » avant d’ajouter « et ça viendra probablement des pays nordiques. Une fois de plus, je n’ai rien contre eux, au contraire c’est des pays sympathiques mais bon, vous vous rendez compte que c’est les descendants des Vikings. Les Vikings c’était des sauvages absolus qui volaient et pillaient tout. »

Dans une autre vidéo, l’enseignant tient également des propos ouvertement transphobes devant ses étudiants :

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« On en arrive à des folies. Il y a une dizaine de jours, la Cour de Cassation a rendu un arrêt où elle a mis un arrêt - c’est du provisoire - c’était quelqu’un qui de mémoire était une femme, ou était chais plus (sic), elle était un homme, j’y arrive même plus, j’ai oublié s’il était d’abord un homme et il est devenu une femme… mais bon bref… c’est un homme qui a engrossé sa femme, enfin qui a eu un enfant avec sa femme et entre-temps il a changé de sexe et donc il a voulu se faire reconnaître comme mère, donc un truc complètement délirant, j’ai oublié l’espèce tellement il m’a laissé perplexe. »

« Mais tout ça pour dire que des portes sont ouvertes et il n’y a plus de limites. C’est-à-dire qu’un homme qui est une femme veut devenir un homme, non un homme qui est un homme veut devenir une femme et il veut être la mère de l’enfant alors qu’il était le père. Alors là le juge il bricole mais c’est peine perdue. […] Il y a un courant puissant. Qui se cache derrière tout ça ? C’est l’homme tout puissant, et c’est ça le plus grave. »

« Vous voyez ces théories dites du genre où au fond, le sexe vous le choisissez. Là encore, objectivement, mettez-vous tout nu devant une glace. […] Au niveau des organes, au niveau biologique pur, il y a clairement des éléments visibles et la bascule entre un sexe et l’autre. Après l’idée est de dire je nie ça. Pourquoi pas, mais il faut bien se rendre compte que là encore, c’est l’homme tout puissant, face à des éléments d’ordre biologique et naturel. »

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Un simple rappel

Contacté par « l’Obs », Julie*, étudiante à la Sorbonne, réagit aux propos de son professeur, qui, selon elle, durent depuis des années : « Je trouve ça aberrant que des professeurs qui tiennent ce genre de propos soit toujours en activité. Ça fait plus de quatre ans que les témoignages sont là, que la fac est interpellée, et elle refuse de mener des actions concrètes. »

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Sur Twitter, l’Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne a condamné les propos de l’enseignant titulaire et a rappelé que l’université est un « lieu qui accueille et respecte chacun, sans distinction selon ses origines, sa religion, ses opinions ou son orientation sexuelle ». Le professeur a fait l’objet d’un « rappel » :

« Les principes de liberté d’expression et d’indépendance des professeurs d’université, aussi fondamentaux qu’ils soient, ne sauraient abriter des propos de nature discriminatoire. L’administrateur provisoire de l’université, Thomas Clay, l’a rappelé dès ce matin à l’intéressé. »

Frédéric Potier, délégué interministériel à la lutte contre le racisme, l’antisémitisme et la haine anti-LGBT, a de son côté remercié l’administrateur provisoire de l’université « pour cette condamnation très claire » et réaffirmé que « la haine anti-LGBT n’a pas sa place à la Sorbonne ».

L’enseignant se défend d’avoir enfreint la loi

Contacté par « l’Obs », le professeur d’histoire du droit affirme être victime « de propos haineux » et assure que « la constitution de la République garantit la liberté d’expression des professeurs des universités ».

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Il se défend d’avoir associé zoophilie et homosexualité : « A aucun moment, je n’ai
mis sur le même plan, homosexualité et zoophilie. Ce propos est aussi scandaleux que
diffamatoire, il est en contradiction radicale avec l’anthropologie que j’ai défendue
pendant mon cours. »

L’enseignant exprime toutefois des regrets sur certains propos et concède que « l’expression directe de ma pensée a pu blesser [l]es personnes [transexuelles]. Je le regrette vivement ».

« En dernière analyse, les propos qui me sont prêtés ou les passages tronqués qui
sont diffusés, ne sauraient prétendre exprimer la substance de l’enseignement
universitaire que j’ai dispensé et qui s’inscrit entièrement dans le cadre de lois qui
protègent encore la liberté d’expression », assure-t-il.

Et d’asséner : « Je n’ai à aucun moment enfreint la loi. » Il dénonce par ailleurs « le procès en sorcellerie qui m’est intenté aujourd’hui, puisque je me trouve traduit devant le plus partial des jurys, la foule anonyme et haineuse des réseaux sociaux ».

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La peine encourue pour injure homophobe ou transphobe est de six mois d’emprisonnement et 22 500 euros d’amende.

*Le prénom a été changé

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